J’avais tout juste une dizaine d’années lorsque j’écoutais non sans une certaine admiration les « grands » du club des cyclo-randonneurs privadois parler dès le mois de janvier de ces fameux périples qui mettent les cyclos en selle, 24 heures durant, en direction de la concentration « Pâques en Provence ». J’écoutais captivé le récit de leurs folles chevauchées au cours desquelles ils affrontaient tous les temps : la pluie, le vent, le froid et parfois même la neige. Du haut de mes 10 ans et alors que je parvenais tout juste à boucler une quarantaine de kilomètres je me prenais à rêver de me mettre dans leur sillage pour partager ces moments uniques où le sport, la convivialité, la solidarité et l’esprit d’équipe prennent tout leur sens.
Les années ont passé et la magie des Flèches Vélocio perdure comme en atteste cette édition 2017 partagée avec une vingtaine de représentants de la Team Cyclosportissimo.
Après une Flèche 2016 rendue difficile par la pluie et le froid qui nous avaient accompagnés sur quasiment la moitié du parcours, c’est sous le signe du mistral que cette Flèche 2017 s’est déroulée. Particulièrement virulent, il ne montra aucun signe de faiblesse tout au long des 24 heures que nous avons passées à sillonner les routes de la Drôme, du Vaucluse, des Alpes de Haute Provence, des Hautes Alpes, de l’Ardèche et du Gard. Un périple de 580 kms, relativement roulant mis à part quelques petits talus du côté de Digne ou de Rosans. Rien de bien méchant pour les 4 solides gaillards avec lesquels je faisais équipe : Jacques, Geoffrey, Thierry et Paul. Affichant une belle cohésion, nous avons respecté à la lettre notre plan de marche, prenant juste ce qu’il fallait d’avance en profitant du vent favorable en début de parcours afin de gérer la seconde partie davantage exposé à éole.
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Le rythme fut soutenu jusqu’à la traversée du Verdon pour entamer la remontée vers Digne. Le compteur affichait plus de 32 km/h de moyenne en grande partie grâce aux puissants relais de Paul qui dans quelques mois s’alignera au départ de la Transcontinentale Race. Geoffrey qui partageait avec Jacques et moi sa deuxième Flèche Vélocio n’était pas en reste pas plus que Thierry, venu de Normandie pour prendre part à la fête ! Seul Jacques semblait quelque peu en retrait, mais notre doyen a de la ressource et il nous le démontrera au coeur de la nuit !
A la faveur des pointages à valider, nous prenions quelques minutes de répit pour refaire le plein d’énergie avant de reprendre la route le coeur vaillant. Le regard des commerçants chez qui nous faisions valider nos cartes de route en disait long sur ce qu’ils devaient penser de notre aventure. Ayant toujours le mot pour rire, au boulanger de Digne chez qui nous avons fait escale, Paul demanda à faire tamponner sa carte de route pour attester de sa présence, prétextant avoir oublié… son bracelet électronique !
En quittant la préfecture des Alpes de Haute Provence, le ciel se fit pour la première fois de la journée menaçant. Mais au fur et à mesure de notre progression vers la vallée de la Durance, tout risque d’averse disparu mais au pris d’un puissant vent du nord qui nous ne nous laissera aucun répit jusqu’à Serres. Il en fallait cependant davantage pour mettre à mal notre petite équipée parfaitement homogène si bien qu’à Serres, point de contrôle n°4, nous comptions encore près de 45 minutes d’avance sur notre plan de marche.
La décision fut prise de marquer une pause un peu plus longue que les précédentes pour nous restaurer avant de repartir pour la nuit. Bien rassasiés après un copieux plat de pâtes, nous remontons en selle alors que le jour commençait à décliner très nettement. Au bout de quelques kilomètres, la nuit allait rapidement nous envelopper mais le vent qui devait « tomber » avec le coucher du soleil selon les prévisions de notre ami Jacques demeurera toujours aussi virulent. Toutefois, il ne fut pas réellement gênant pour notre traversée du pays de Rosans puis le long de la vallée de l’Eygue au débouchée de laquelle nous allons avoir le plaisir de retrouver l’équipe conduite par Pascal autour de la fameuse « bridoumobile » faisant office de véhicule d’assistance et de ravitaillement. Bien que l’arrêt fut bref, ce point de rencontre fut l’occasion d’échanger sur nos progressions respectives avec comme point commun le vent !
Nous voilà remontés en selle en direction de Nyons avant de mettre le cap sur la rive droite du Rhône à hauteur de Viviers où nous allons effectuer une pause express le temps d’un selfie nocturne devant le panneau d’entrée de cette citée épiscopale. Le cap des 400 kms étant largement dépassé et il ne nous reste dès lors plus que l’équivalent d’une « petite » sortie d’environ 150 kms pour arriver au terme de notre aventure…
Si Jacques s’est bien refait la cerise, Geoffrey semble de son côté marquer un peu le pas mais fidèle à l’esprit de solidarité qui nous anime, nous allons tâcher de le ramener sans trop de peine à bon port.
La route en direction de Alès ne présente pas de réelle difficulté et le vent est redevenu favorable. Geoffrey fait preuve de beaucoup de courage pour s’accrocher mais à la sortie de Alès, alors que nous trouvons une boulangerie ouverte, il faut se rendre à l’évidence. Il lui sera en effet difficile de pouvoir continuer même s’il ne reste tout au plus qu’une cinquantaine de kilomètres à parcourir. En pareille situation, la sagesse l’emporte même si la frustration est grande de ne pas repartir à 5. C’est donc Delphine et Coralie qui viendront récupérer notre infortuné Geoffrey alors que de notre côté, nous reprenons la route pour effectuer les 50 kilomètres qui nous séparent encore de Vénéjan, terme de cette Flèche Vélocio rondement menée.
Malgré son abandon, Geoffrey peut être fier de ce qu’il a réalisé d’autant qu’il a fait preuve d’une belle générosité dans l’effort tout au long du parcours. Son aide a été précieuse lorsqu’il fallait faire face au vent et l’expérience acquise au cours de cette seconde Flèche Vélocio lui sera fort utile lors de la prochaine aventure que je vais avoir le plaisir de partager en sa compagnie au cours du week-end du 8 mai sur les routes de la Région Auvergne Rhône-Alpes. Mais nous n’en sommes pas encore là !
C’est sur les coups de 8h30 que Thierry, Paul, Jacques et moi arrivons à Vénéjan, soit une petite demie-heure de plus que ne le prévoyait notre tableau de marche. Qu’importe, même si nous avons eu régulièrement l’oeil sur le chrono, l’essentiel n’est pas là. Nous avons partagé une aventure humaine particulièrement forte, sans accro, affichant en permanence une belle complicité et une sérénité sans faille. A bien y réfléchir, ces 24 heures sont passées vite, très vite et sans doute trop vite… Ce sentiment est partagé par nos collègues des autres équipes aux couleurs de la Team Cyclosportissimo que nous retrouvons petit à petit sur l’aire d’arrivée à laquelle on accède après un ultime effort par des ruelles pavés aux pourcentages dignes de ceux du mur de Huy !
Chacun peut désormais savourer à sa manière cette belle aventure avant de nous retrouver tous autour d’une table pour clôturer ce formidable week-end passé ensemble.
Quant au petit bonhomme rondouillard qui écoutait les récits des « grands », voilà qu’il vient de décrocher sa seconde Flèche Vélocio… Merci François, René, Marc, Robert et tous les autres. Vous êtes à l’origine de ma passion pour le vélo, le vélo autrement où le plaisir est une fontaine de jouvence intarissable.
A lire également le récit d’une Flèche en duo réalisée avec beaucoup de maîtrise par Patricia Berthelier et Calire Carme, assurément les « petites reines » de la Team Cyclosportissimo sur cette édition 2017.
http://www.patbert.net/2017/04/24-heures-au-feminin-pour-un-duo-teamcyclosportissimo.html