Après une saison déjà bien remplie, l’envie de relever un dernier challenge demeure intacte. C’est comme un appel inconscient auquel il est difficile de résister tant le souvenir du plaisir que l’on éprouve à l’issue de ces aventures qui sortent de l’ordinaire ne s’estompe jamais. Passé le temps des questions rationnelles : « est-ce bien raisonnable ? » « ai-je encore la forme ? », la passion prend très rapidement le pas sur la raison et voilà comment on se retrouve au départ d’un aller et retour jusqu’au somment du Mont Ventoux depuis Valence après avoir fait un break complet de 5 semaines au cours de l’été pour cause de travaux d’aménagement intérieur 😉
Début septembre, lorsque j’ai repris une activité cycliste régulière, j’ai immédiatement coché la date du 27 septembre avec la ferme intention d’être prêt pour ce raid dit « VMV² » (Valence – Mont Ventoux – Valence) soit 320 km et un peu moins de 3 000 mètres de dénivelé. Une aventure qui n’a rien de sur-humain mais qui sort néanmoins de l’ordinaire et permet d’avoir un objectif motivant à une période de l’année où le laisser aller est une menace constante…
A raison de 2 sorties par semaine jusqu’au 22 septembre, soit quasiment 600 km, j’ai retrouvé un coup de pédale rassurant en prévision de cet ultime challenge de la saison 2014. Restait une dernière incertitude à lever : la météo et surtout le vent. En effet, si d’aventure le mistral venait à être de la partie, le retour pourrait s’annoncer délicat. Finalement, les conditions vont être incroyablement favorables avec un léger vent de nord pour la descente jusqu’à Bédouin qui comme par magie, va tourner au sud à la mi-journée. Si l’on ajoute à cela le soleil, le ciel bleu et une température agréable, on aurait eu tort de se priver !

C’est donc à 7h15, sur les bords du Rhône, à la sortie de la Roche de Glun au nord de Valence, que débute ce fameux Raid VMV². Pour l’occasion, 2 solides gaillards vont faire route avec moi. 2 habitués des longs raids cyclosportifs qui comme moi ont notamment participé à Bordeaux Paris et au Tour du Mont Blanc en 2014. Le premier, Jacques, fait toujours preuve d’une volonté incroyable et ne lâche jamais rien lorsqu’il a un objectif en tête, le second, Jean-Luc, alias « Stakhanov », se plaît à relever des défis toujours plus fous. Me voilà donc en bonne compagnie !
Le parcours retenu pour aller jusqu’au pied du Ventoux ne présente pas de difficultés majeures, tout juste faut-il franchir le petit col de Sausse après Bouvières; simple formalité. Nous progressons sur de bonnes bases puisque nous affichont une moyenne de 29 km/h en arrivant à Nyons après avoir effectué 110 km depuis le départ. Dans une ambiance quasi estivale, nous poursuivons notre route en direction de Vaison la Romaine et bientôt, la silhouette du géant de Provence apparaît comme dans un décor de carte postale.
A Malaucène, nous laissons Jacques qui préfère monter par le versant nord. Je continue donc en compagnie de Jean-Luc en direction de Bédoin via le petit col de la Madeleine. A la sortie de Bédoin, nous croisons quelques collègues du Friol Club Tain Tournon qui en ont terminé avec l’ascension du Géant. Pour nous, les choses sérieuses sont sur le point de commencer…
Jusqu’au fameux virage de Saint Estève, la pente n’est pas vraiment sévère, en revanche, une fois celui-ci passé, on entre dans le vif du sujet. Jean-Luc a déjà pris les devants et je sens que ce n’est pas aujourd’hui que je ferai un temps dans le Ventoux !
J’éprouve immédiatement le besoin de mettre le plus petit développement et me voilà engagé dans une longue, très longue, très très longue ascension du Ventoux… Je m’installe dans un faux rythme, quasiment soporifique, sans être ni mal ni bien. J’ai l’impression de progresser en mode « pilotage automatique » sans parvenir à me faire violence pour relancer la machine. La pente redevenant moins forte après le chalet Reynard, j’espère pouvoir en profiter pour sortir de cette léthargie mais rien n’y fait, je poursuis ma lente progression vers le sommet où je retrouve Jean-Luc qui commençait à se poser des questions à mon sujet !
Au sommet, le spectacle est toujours aussi saisissant avec une vue à 360° qui va de la plaine du Rhône aux Alpes du Sud, entre comtat Venaissin et Baronnies. Comme nous, ils sont nombreux les cyclistes à profiter de cette belle journée de septembre pour s’offrir une telle récompense après avoir vaincu ces pentes rocailleuses. A l’instar de Pétrarque, ils auront la fierté de dire « J’ai fait aujourd’hui l’ascension de la plus haute montagne de cette contrée que l’on nomme avec raison le Ventoux, guidé uniquement par le désir de voir la hauteur extraordinaire du lieu« .
Après les traditionnelles photos d’usage pour immortaliser notre passage au sommet il est grand temps de replonger vers Malaucène avec la satisfaction du devoir accompli même si ce fut quelque peu laborieux. C’est dans une ambiance quasi estivale que nous engageons dans cette descente : c’est parti pour 21 kilomètres de sensations fortes !
Les virages s’enchaînent les uns les autres, la vitesse dépasse régulièrement les 80 km/h. L’Axxome est comme sur des rails, tenue de route parfaite, prise d’angle optimisée sans dans les virages. Bref, le comportement de l’Origine est exemplaire et met en confiance.
A Malaucène, nous retrouvons Jacques et en profitons pour remplir nos bidons et nous rafraîchir le visage. Le plus dur est désormais derrière nous mais il nous reste tout de même encore 150 kms à parcourir pour achever notre périple.
Comme annoncé, le vent a eu la bonne idée de tourner au sud si bien que dès les premiers tours de roues, le compteur s’emballe : 35, 37, 40 km/h ! A ce rythme, nous serons vite de retour ! Néanmoins, quelques kilomètres après Vaison la Romaine, la bosse de Buisson va temporairement calmer nos ardeurs. Sous un soleil toujours aussi généreux nous allons traverser les vignobles du sud de la Drôme et de l’enclave des Papes où les vignerons s’activent en cette période vendanges. Les rayons du soleil commencent à devenir de plus en plus rasant soulignant davantage les contrastes du paysage et mettant notamment en valeur le château de Grignan au pied duquel nous passons.
A Montélimar, nous effectuons une pause au McDonald non pas pour avaler un double cheese-burger mais pour nous rafraîchir avec un maxi Coca zéro. Après cette courte pause, nous reprenons notre remontée vers le nord. Le cap des 250 km et des 9h de selle sont passés et les jambes tournent à merveille. L’Axxome ne bronche pas, il semble au contraire en redemander lorsqu’il faut relancer l’allure, les mains bien calées au bas du cintre. J’éprouve des sensations incroyables à mille lieux de ce que j’ai pu ressentir sur les pentes du Ventoux ! Les relais s’enchaînent régulièrement et nous maintenons une allure aux environs de 35 km/h.
Rochemaure, Meysse, Cruas, Baix, Le Pouzin… les villages défilent et Valence se rapproche. Nous arriverons finalement aux portes de la Préfecture de la Drôme à 19h, en avance d’une bonne demie-heure sur l’horaire estimé. Ainsi va s’achever ce raid VMV² long de 320 km et bouclé en à peine 11h30. Une aventure partagée à 3 dans un formidable état d’esprit qui en appelle d’autres…